Hier et aujourd'hui: des Héros.

 

Qui sont ils ? Que sont ils ?

 

            Ces personnages nous passionnent, nous inspirent, et nous unissent, réveillant en nous des Histoires ancestrales et faisant écho aux mythes lointains.
Ce postulat peut paraitre enfantin, après tout, comment un gugusse en collants bleus et rouges avec un slip par dessus le tout (plus maintenant Hallelujah) pourrait il représenter une quelconque source d'inspiration ? Tout le monde aura bien évidemment compris la référence au plus ancien et à l'archétype de tous les Super-Héros: Superman.
Et pourtant, nombre de lecteurs savent bien qu'ils ont le potentiel pour véhiculer des histoires intelligentes et des valeurs universelles.
Seulement, si les personnages tels que Superman et Batman sont relativement récents dans l'Histoire humaine (publié par DC Comics en 1938 pour le premier et en 1939 pour le second), force est de constater qu'ils sont les vecteurs et porteurs de valeurs et d'idéaux remontant bien plus loin dans le temps.
 
Depuis leur apparition dès le milieu des années 1930, ils sont omniprésents dans la culture populaire américaine. Incarnant un idéal et représentant la perpétuelle évolution de la société qui leur donne vie (tant sur le plan social, qu'économique ou spirituel), ils ont illustré la Guerre Froide, le Maccarthysme, le Viêt-Nam, la peur du nucléaire et nous accompagnent à chaque période de l'Histoire depuis bientôt un siècle.
 


A la question "Que sont ils ?", il me semble important de répondre que ceux-ci ne sont pas apparus ex nihilo, loin de là. Ils sont en effet les héritiers de nombre d'autres figures avant eux tels que les Chevaliers de la Table Ronde (d'où le surnom de Chevalier d’Émeraude pour l'un, de Chevalier Noir pour un autre), Robin des Bois, Zorro, les Héros et dieux grecs etc (certains sont même repris par les maison d'éditions comme Hercule chez DC et Marvel), ils sont de possibles relectures des mythiques couples littéraires tel que Docteur Jekyll et Mister Hyde pour ne citer que celui-ci, une métaphore de la dualité de l'homme et seront même l’écho, d'abord littéraire, puis cinématographique de personnalités publiques telles que Franklin Delano Roosevelt dont la victoire sur la crise économique s'est opérée malgré une paralysie l'obligeant à se déplacer en fauteuil roulant, Martin Luther King ayant lutté pour l'abolition de la discrimination à l'encontre des noirs et l'intégration de ceux-ci au sein de la société, ou encore Malcolm X.
D'ailleurs, Zack Snyder, réalisateur de Man Of Steel déclare lui même (en parlant des personnages de DC Comics): "Ce sont vraiment les archétypes les plus purs. Ils sont littéralement bibliques. Si vous donnez vie correctement aux personnages de DC, ils peuvent être importants, ils peuvent nous concerner", témoignant de l'universalité de leur impact.

A la question "Qui sont ils ?", je serai tenté de répondre "nous". Amenés à la vie par les hommes et les femmes qui nous content leurs histoires et odyssées depuis maintenant plus de soixante-dix ans, ils représentent en effet l'incarnation de nos espoirs, de nos doutes et de nos peurs. Ils représentent pour certains ce à quoi l'Homme aspire, ce vers quoi il tend.
Embrassant la lumière pour l'un, flurtant avec les ténèbres pour un autre, les approches ont beau se distinguer, l'histoire reste la même: celle d'un homme qui cherche à devenir un Homme, celle de celui qui embrasse son potentiel humain afin de surpasser sa condition.

Quant à savoir à quoi ressembleront les Héros de demain, il ne tient qu'à nous de leur donner vie. 



" You won't find the answers by looking at the stars
It's a journey you'll have to take by looking inside yourself "







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Les Super-Héros: une histoire d'héritage (Partie I)

 

Dans les pas de Moïse

 

 

              Souvent considéré comme un dieu à part entière en raison de ses pouvoirs extraordinaires, le Dernier Fils de Krypton revêt pourtant d’avantage une dimension prophétique et messianique que divine.
Tout d’abord, on le présente très régulièrement comme une guide pour le peuple, un élu qui doit inspirer les hommes à donner le meilleur d’eux mêmes. En cela, il est une allégorie de Moïse, le premier prophète du Judaïsme. Tel Moïse guidant le peuple hébreu à travers le désert, Kal-El guide le peuple de la Terre à travers les difficultés et l’encourage, par l’exemple, à devenir meilleur. On peut d’ailleurs entendre Jor-El dans le film  Man Of Steel s’adresser à son fils : « They will race behind you, they will stumble, they will fall. But in time, they will join you in the sun. In time, you will help them accomplish wonders». Cela dénote avec pertinence la dimension de guide, intrinsèque au personnage de Superman, le peuple marchant dans ces pas, chutant, mais se relevant, dans la lumière de son exemple.
Au delà de son aspect de guide, il partage avec Moïse un exil involontaire. En effet, alors que Pharaon souhaite la mort de tous les nouveaux nés du sexe masculin, sa mère Jocabed le cache puis l'abandonne sur le Nil, dans une corbeille afin que celui-ci puisse vivre. Il sera finalement recueilli par la fille de Pharaon. De son côté, Superman nait sur Krypton dans une période instable. Peu après sa naissance, alors que la planète est condamnée à la destruction, les parents du petit Kal-El le placent dans une vaisseau et l'envoient à travers l'espace, sur Terre, pour que celui-ci, comme Moïse, puisse vivre.
D’ailleurs, le nom d’origine de Superman, à savoir Kal-El, est d’origine hébraïque et peut être interprété comme « voix de Dieu » ou encore « chevalier de Dieu ». Ses créateurs, Jerry Siegel et Joe Shuster étant deux fils d'immigrés juifs, on comprend mieux les influences judaïques qui ont bercé le personnage lors de sa création.
Et d'ailleurs, Lex Luthor ne serait-il pas le reflet de Ramsès II qui, tout comme le premier n'a de cesse de mettre son adversaire à l'épreuve ? Car pareillement à Lex Luthor, Ramsès II méprise le commun des mortels (en particulier les Hébreux), mais c'est bien Moïse qu'il souhaite détruire en faisant souffrir son peuple. De la même manière, Lex Luthor fait souffrir les habitants de Métropolis en testant Superman avec toujours plus de haine et d'ambition. Peut-être l'aspect chauve des deux personnages n'est-il pas une coïncidence, et que la corélation entre Superman et Moïse s'étend également à leurs "nemesis" respectifs ...
(Anecdote: Les personnages de Ramsès II dans le film d'animation Le Prince d'Egypte et de Superman dans la série animée Superman: l'Ange de Métropolis sont tous deux doublés en français par le comédien Emmanuel Jacomy)




















De plus, l’Ange de Métropolis est explicitement comparé à Jésus Christ dans le film de Bryan Singer Superman Returns de 2006 : «They can be a great people, Kal-El, they wish to be. They only lack the light to show the way. For this reason above all, their capacity for good, I have sent them you ... my only son». Ainsi, tel Dieu envoyant son “fils” unique Jésus guider le peuple de la Terre, Jor-El envoie le sien, accomplir la même mission. 
 

Par ailleurs, il est généralement mis en scène en contre jour d’un halo de lumière, voire du Soleil lui-même. C’est le cas sur l’arc « For Tomorrow » de Brian Azzarello et Jim Lee, dans lequel ce dernier le représente à de multiples reprises face à un prêtre, en contre-plongée ou dans un contre jour laissant apparaître une croix en arrière plan. Dès lors, un parallèle avec le Messie de la religion Chrétienne est inéluctable. Et bien que les créateurs de l’Homme d’Acier étaient deux adolescents juifs, il est indéniable que l’inspiration puisse venir entre autre du Fils de Dieu.


Les interprétations de ce personnage peuvent être multiples. Comme le souligne Loïs Lane dans Man of Steel: « For some, he was a guardian angel, for others, a ghost who never quite fit in ».

Il est dans cet article fait mention de l’influence indéniable de Moïse et de Jésus. Cependant, de nombreuses autres lectures sont possibles. Ainsi, Superman peut tout aussi bien figurer, sous sa forme civile, Zeus sous forme humaine aidant ponctuellement les humains. D'autres peuvent voir en lui, comme ce fut développé dans un article précédent, l’individu ayant subi la chute décrite chez Platon et tentant de fuir la caverne. D'autres encore pourraient y lire un Chevalier moderne comme en attestent sa cape majestueuse et son blason symboliquement porté sur le torse. Et pourquoi pas un ange ? Comme le laisse sous entendre le titre français de Superman: the animated series traduit par Superman: l'Ange de Métropolis.

 

 

 

Personnage précurseur, aussi bien d'un genre littéraire (le comics de Super-Héros) que d'une action, Superman est un prophète dans l'édition
et dans ses aventures.

"A genius in intellect, a Hercules in strength, a nemesis to all wrong doers, The Superman !"






PS: Je vous recommande vivement l'écoute du morceau "Trials" issu de la bande originale de Smallville, composée par Louis Frebre. Avec le thème mythique de John Williams, ce morceau est pour moi la meilleure création musicale que le personnage se soit vu offrir. Vous le trouverez dans la playlist Deezer présente dans la colonne de droite. 

 

 

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Les Super-Héros, une histoire d'héritage (Partie II)

 

La cape, le masque et la pipe

 

 

                    On sait que les parents de Bruce Wayne alias Batman sont les illustres philanthropes de Gotham City, Thomas et Martha Wayne. Mais ce que l’on sait moins, c’est que plus tôt dans son arbre généalogique, l’homme chauve-souris compte également Dracula, mais aussi Sherlock Holmes ainsi que Zorro. 

 

 

                En effet, il semblerait que dans ses grandes lignes, le personnage de Batman soit un melting-pot de la littérature populaire du XVIIIe et du début du XIXe siècle. De l’aveu de ses créateurs, Bob Kane et Bill Finger, la principale influence qui conduisit à la création du Chevalier Noir fut le film Le Signe de Zorro avec Douglas Fairbanks dans le rôle titre : « Quand je me suis rappelé Zorro, pataud la journée et vengeur masqué le soir, cet homme qui sortait d’une cave, sur son cheval noir, j’ai eu l’idée de Batman, de la Batcave, de la Batmobile et du masque ». De plus, tel Zoro marquant d'un Z les lieux de ses péripéties, Batman orne le ciel de son majestueux bat-signal, à la fois symbole de protection sur la cité de Gotham et appel d'urgence lorsque le Commissaire Gordon le juge nécessaire.

 

Aujourd’hui encore, cet héritage est connu des artistes et revendiqué. D’ailleurs, l’auteur écossais Grant Morrison rend hommage aux origines du Caped Crusader sur son run The Return of Bruce Wayne durant lequel Bruce Wayne, perdu dans le temps après Final Crisis se retrouve incarné à différentes époques de l’Histoire. 

 

 

L’une d’entre elles est le Wild West du début du XIXe siècle. On peut alors y voir Bruce Wayne, camper un chapeau noir et vêtu d’un ensemble semblant tout droit sorti de la garde robe de Zorro, chevaucher un destrier noir. 

La ressemblance est indéniable, et l'héritage incontestable. Bien que Batman agisse au XXe siècle (lors de sa création), Grant Morrison rappelle une nouvelle fois les véritables origines du personnage en l'immortalisant ici dans une pose emblématique, celle du cavalier surgissant hors de la nuit, Zorro. 

 

 

 

 

 

                 Mais Zorro ne constitue pas la seule source d’inspiration ayant contribuée à la création du Chevalier Noir. En ce qui concerne Dracula, célèbre personnage littéraire de la fin du XVIIIe siècle, porté à plusieurs reprises à l’écran, Batman semble hériter de lui sa part gothique/chauve-souris de laquelle il tire son nom et son activité exclusivement nocturne. Cependant, hormis ces deux aspects ainsi que la cape commune aux deux personnages (mais que Batman hérite de Zorro), les points communs paraissent s’arrêter ici. A moins que Bruce Wayne ne dorme dans un cercueil et ne prenne des cuites au sang, les ponts me paraissent minces entre le célèbre vampire et l’homme chauve-souris. Il existe toute fois une rencontre anecdotique des deux personnages dans le film animé Batman VS Dracula.



             Enfin, le dernier mais pas le moindre, une influence majeure sur l'homme chauve-souris, le plus grand détective du monde (premier du nom), j’ai nommé Sherlock Holmes.
Effectivement, Batman apparaît pour la première fois dans Detective Comics #27 en 1939, soulignant ainsi, même sans lien pertinent au premier abord, la dimension policière du personnage. Bien sûr, rien dans l’apparence physique de l’homme chauve-souris ne laisse transparaitre un quelconque héritage du style vestimentaire du détective de Sir Conan Doyle, mais cependant, quelques gadgets ornent la ceinture du Chevalier Noir, à qui l’on attribue très rapidement le titre de « plus grand détective du monde », détenu jusque là par Sherlock Holmes. 

 

 

De plus, comme Sherlock, Batman fait toujours appel à sa très large connaissance dans de nombreux domaines et à la puissance de la déduction pour résoudre différentes affaires, et maitrise, tel son aïeul, plusieurs styles de boxes et d’arts martiaux. D’ailleurs, nombreuses sont les référence à cet héritage puisqu’à maintes reprises, les deux détectives furent représentés ensemble dans divers pastiches et parodies mettant en jeu les talents des deux figures, mais également dans des numéros spéciaux. Pour le Cinquantième anniversaire de DC Comics, les deux hommes se rencontrent dans les pages du numéro 572 de Detective Comics qui contient une histoire inédite d'Holmes ainsi qu'une aventure en duo partagée par les deux figures devant résoudre l'affaire du "Doomsday Book".

 

Par ailleurs, les deux hommes se rencontrèrent antérieurement à ce récit puisqu'une apparition de Sherlock Holmes est réalisée dans un numéro de l'âge d'or de Detective Comics.

 




Personnage aux influences multiples, Batman n'est cependant pas une simple relecture des figures desquelles il découle. Il est avant tout une création originale et un personnage à part entière dont la lignée s'inscrit dans celle d'autres figures mythiques de la littérature populaire.

 

 

 

 

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Les Super-Héros: une histoire d'héritage (Partie III)



                     Tout comme beaucoup d'autres Super-Héros, Spider-Man doit une de ces origines à une figure héroïque qui lui est antérieure, dans son cas en la personne de l'homme-singe: Tarzan. 
Tous deux orphelins, souverains de leur royaume respectif, ils partagent un territoire commun : la jungle. Végétale pour l’un, urbaine pour l’autre, la nature de celle-ci a beau différer, Tarzan et Spider-Man n'en demeurent pas moins les Rois.
D'ailleurs, leur mode de déplacement au sein de ce royaume les distingue et leur confère la singularité d'un Être supérieur. Ni cheval, ni voiture, ni vélo, ni transports en commun, mais des lianes, des arbres, des toiles et des buildings. 
D’une jungle à l’autre, les lois sont les mêmes, et les moyens de se déplacer rapidement semblent limités. En cela, l'homme-singe et l'homme-araignée partagent donc déjà un point commun, le trafic sensible de la jungle et leur façon de l’appréhender. Ainsi, le balancement et l'escalade semblent être les modes de déplacement les mieux adaptés et les plus efficaces pour la jungle, naturelle ou urbaine. 
Prolongement naturel de la jungle pour Tarzan, les lianes de Spider-Man sont le fruit de sa création puisqu’il en est à l’origine. Là où le premier semble prisonnier de cet environnement duquel il parvient tout de même à tirer profit, le second concilie « emprisonnement » et création de son environnement. 
Ainsi, bien que les structures nécessaires à son déplacement soient figées et immuables au même titre que les arbres qui permettent à Tarzan son déplacement si particulier, Spider-Man a le choix d’agencer ses toiles de la façon qu’il souhaite, donnant une perspective sans limites à son déplacement.
Et même si les affiliations entre ces deux personnages ne sont pas ouvertement revendiquées, il est incontestable qu’il existe de nombreuses similitudes et influences (in)volontaires de l’un à l’autre.
 
En outre, la jungle New-Yorkaise sur laquelle règne l'alter-ego de Peter Parker possède, tout comme celle de Tarzan, ces prédateurs et sa hiérarchie au sein d'une chaîne de survie bien ordonnée. Les chasseurs cèdent leur place aux caïds, les fauves se substituent aux agresseurs divers. 
Par ailleurs, on retrouve une autre similarité entre les deux personnages, leur cri. Emblème de victoire chez Tarzan ou cri dû à l’adrénaline des balancements vertigineux chez Spider-Man, les deux s’élèvent au dessus de leur royaume respectif comme un symbole de domination sur leur territoire, chacun Maître de son environnement.


Explicitement inspiré de l'homme-singe, Spider-Man représente le Tarzan moderne et urbain. Il partage avec lui son cri de victoire ainsi que son déplacement. Cependant, il s'émancipe de son modèle par sa double identité et son statut. Là où Tarzan se contente de protéger sa "famille", l'alter-ego de Peter Parker veille sur sa cité entière: New-York.




 

Où le (Super)-Héros reflète l'esprit de contradiction

 

Cet article peut paraitre familier, une impression de déjà lu, mais il existe tant d'interprétations possibles à la révélation du Héros qui sommeille en chacun de ces personnages qu'il me semble important d'en exposer plusieurs, ou du moins celles que je perçois.

 


                Être un (Super)-Héros, qu'est ce que cela signifie ? Botter des fesses ? Se promener en collants ? Être un modèle patriotique ? Défendre la veuve, l'orphelin et la Cité ? Être un guide ? Se défaire des chaines matérielles et morales ? Être à la frontière entre Dieux et mortels ?
Les "critères de sélection" semblent être innombrables. Pourtant, certains prévalent sur d'autres. Il a été fait mention dans les articles précédents de la réalisation de son potentiel comme facteur crucial de "l'apparition" du (Super)-Héros. C'est de cette réalisation dont il sera ici question, vue sous un autre jour. Ce court article est donc un complément aux autres et a pour but de donner une nouvelle lecture à cette révélation.

Se construire: en voilà une tâche ardue. Nous naissons. Nous grandissons. Nous intégrons des codes, des valeurs, une morale. Nous nous construisons en calquant notre image à celle des autres, celle d'un modèle qui nous sert de repère.
Mais vient un jour où les images sur lesquelles on se calque et se construit ne suffisent plus à savoir qui l'on est, où l'argument d'autorité n'a plus de légitimité. Ce jour est celui du passage à l'âge adulte. Or, ce passage ne peut se réaliser que si l'individu traverse une remise en cause de lui même, de son identité sans les autres. Les choses sont comme elles sont, mais pourquoi ? Qu'elle sont les raisons qui font que je suis moi et pas un autre ? Savoir qui l'on est ne suffit plus. Seul sentir qui l'on est importe. 
Tel Clark Kent jeune sachant qu'il est voué à achever de grandes choses mais ayant parfois peur d'endosser le rôle de sauveur, l'individu en construction, bien que sachant de quoi il est fait, est effrayé par l'optique de remettre ce bien fondé en question. Or, comment sentir qui l'on est sans l'esprit de contradiction pour tout remettre en question ?
C'est en partie cet esprit de contradiction qui permet l'apparition du (Super)-Héros. Car oui, même si celui-ci est conscient de son élection, de son destin hors du commun, ce n'est qu'en le remettant en question qu'il accède au statut qu'on lui connait. En effet, comment hériter entièrement d'une identité qui nous est donnée, qui nous semble due, sans la remettre en cause ?
Dans un monde où notre identité nous est donnée et non pas offerte en récompense d'une quête, où l'anonymat semble de rigueur, le (Super)-Héros remet celle-ci en question. Et d'ailleurs, qui peut prétendre sentir qui il est réellement avant d'avoir remit en cause ce qui fait de lui ce qu'il prétend être ? Savoir qui l'on est permet de vivoter, sentir qui l'on est permet de vivre ! C'est cette tâche qu'accomplie le (Super)-Héros en interrogeant son élection, pour finalement y revenir.


Ainsi, le voyage du (Super)-Héros, et par extension, de l'individu en construction, est parfois effrayant car l'on craint qu'il ne mène vers des contrées lointaines et étrangères, dont on ignore tout, alors qu'il n'a pour seul but de rendre limpide ce que l'individu savait juste, sans le sentir justifié ni mérité, et de lui permettre de poursuivre sa route, dans la pleine lumière de l'identité qui lui est due et qu'il mérite désormais. 



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